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Margarita
--> Cette panthère égarée

Je pense à elle.

Avec ses bottes blanches laquées en dessus des genoux, ses shorts blancs qui couvraient juste la rondeur absolue de ses fesses (cousus par elle même à son cours de couture), sa petite blouse moulante à manches courtes couleur d'aigue-marine et sa casquette.

Elle avait droit de sortie seulement le dimanche, après avoir laissé la maison impeccable. Elle devait avoir 21 ans et son corps était une statue d'ébène chaud, solide et élastique mi-pantère, mi-chatonne. Elle était presque une esclave comme ses ancêtres, qui s'étaient enfuis dans la jungle humide pour qu'elle puisse naître libre. Ses proches cherchaient de l'or en pépites dans le lit de fleuves perdus et isolés. Elle était venue dans cette ville lointaine pour travailler. On payait très mal les bonnes, et des noires y en avait à la pèle dans cette ville tropical, c'était encore pire que maintenant...elles ne savaient rien sur leurs droits, mais mon père lui payait des cours de couture.

Elle chantait tout le temps, des fois à l'unisson avec sa petite radio à transistors. Elle chantait des chansons tropicales où les tambours lui ramenaient ses racines qui, arrachées à un autre continent, se sont accrochées à ce nouveau sol fertile mais cruel.

Margarita avait le plus beau et tendre des sourires, ses dents blanches était rayonnantes de joie et sa voix, pure mélasse, montait et descendait comme une montagne russe, remplissant l'air de rythmes ensoleillés. Elle dansait en travaillant, et rêvait du dimanche, le plus beau jour de la semaine, où elle se faisait encore plus belle pour aller danser à des endroits où les noirs de la ville se réunissaient pour faire la fête. Elle était une princesse. Je grimpait sur le frigo pour lui tenir compagnie, pendant qu'elle nous faisait à manger, pour me faire bercer par son rythme et m'envelopper de sa tendresse. 

 

Ecrit par , le Jeudi 24 Juillet 2003, 13:54 dans la rubrique Souvenir.